Au Cœur de la Nuit Rouge, résidence et exposition de Marine Lanier au Centre d’Art et de photographie de Lectoure
Marine Lanier développe depuis plusieurs années une œuvre photographique au seuil du réel où la fiction, le mythe et une certaine forme de symbolisme nourrissent un imaginaire visuel à la troublante puissance d’évocation.
Nos Feux nous appartiennent (2007-2016), Le Soleil des loups (2018), Les Contrebandiers (2020) : ces « titres-images », pour citer l’auteur et photographe Eric Bouttier, donnent la mesure du caractère épique des « fables documentaires » façonnées par Marine Lanier. La nature, notre relation au vivant, au primitif, au sauvage, sans oublier son regard porté sur des existences et des communautés humaines en marge constituent le cœur de ses projets au long cours.
Elle puise ainsi dans son histoire familiale – une arrière-grand-mère aveugle avide de récits imagés et un arrière-grand-père capitaine qui n’a jamais navigué – mais également dans la littérature de voyage que celle-ci soit purement imaginaire, intérieure ou relatant des récits sensibles de découvertes de territoires naturels impressionnants, à l’instar de ceux de Jack London, de Henry David Thoreau, de Joseph Conrad, de Jules Verne, parmi d’autres.
Détachée de tout idéal de réalisme documentaire, Marine Lanier élabore une iconographie personnelle à l’esthétique radicale. Les jeux de décadrages, les gros plans, les portraits sous filtres monochromes, les lumières irradiantes et les clairs obscurs mystérieux composent d’authentiques visions oniriques au potentiel narratif.
Ces images sont aujourd’hui inséparables du travail d’écriture que l’artiste réalise en parallèle ou au départ de ses « photo-fictions » notamment pour les plus récentes, actuellement présentées au Centre d’art et de photographie de Lectoure : L’Habit de naufrage (2021) et Le Jardin d’Hannibal (2019-2022). Pour L’Habit de naufrage, Marine Lanier aborde à travers un personnage fictif de capitaine et son journal de bord, la part de mystère et de danger inhérents à l’imaginaire du monde de la mer – profondeur des abysses, violence des éléments, destinées humaines tragiques – qu’elle immortalise dans des photographies surnaturelles prises au cours de divers arpentages des côtes bretonnes, lors d’une résidence avec L’Imagerie à Lannion. Réalisée dans le cadre d’une commande publique nationale menée par la Bibliothèque nationale de France, Le Jardin d’Hannibal prend pour décor le jardin-laboratoire du col du Lautaret, par lequel Hannibal, le célèbre général de l’Antiquité, aurait mené sa légendaire traversée des Alpes. Pendant plusieurs mois, Marine Lanier a suivi chercheurs, étudiants et jardiniers attachés à analyser l’évolution et l’acclimatation de la biodiversité en cette période charnière de bouleversement climatique.
Dans les pas de précurseurs de la photographie du vivant, Marine Lanier réalise un singulier herbier photographique de cet écosystème du futur, dont elle dessine les contours hallucinés.
Damarice Amao, commissaire de l’exposition
Photo : Marine Lanier, Le Jardin d’Hannibal, Les Pierres #1 © Marine Lanier / Grande commande photojournalisme
Exposition jusqu’au 24 janvier 2024
Mercredi- dimanche de 14h à 18h, entrée libre.
Fermeture exceptionnelle 23 décembre 2023 — 8 janvier 2024