La Floureto : Dernier rendez-vous 2025 avec « La disparition de Josef Mengele »
Ce samedi 13 décembre, le cinéma Grand Angle de Fleurance a accueilli la dernière conférence de l’année 2025 organisée par La Floureto. Une soirée intense, qui a rassemblé un public nombreux pour un programme en deux actes : la projection du film La disparition de Josef Mengele, suivie d’une conférence animée par Laurent Mauras, historien et président de l’association.
Retracer la cavale du « Docteur » après 1945
Laurent Mauras a décortiqué avec précision le parcours de Josef Mengele après la chute du nazisme. Il a notamment raconté la rencontre, en Argentine, entre Mengele et Adolf Eichmann – une entreprise marquée par un mépris mutuel. Le premier, médecin bourgeois d’Auschwitz, avait encore de l’argent et des réseaux ; le second, ancien bureaucrate de la mort, n’était plus qu’un homme aigri et vaniteux. Malgré tout, leur fidélité à l’idéologie nazie demeurait intacte. À noter qu’Eichmann, lors de son arrestation, niera toujours avoir croisé Mengele.
Un détail a joué un rôle clé dans sa fuite : l’absence du tatouage de groupe sanguin, pourtant obligatoire chez les SS. Cela lui a permis de se fondre dans la masse des soldats vaincus en 1945. Il quitte Auschwitz avec ses archives scientifiques, mêlant chance, argent et une certaine rouerie.
De Buenos Aires au Brésil : deux vies de fugitif
Sa cavale se scinde en deux temps. D’abord l’Argentine péroniste, terre d’accueil pour d’anciens nazis, où il mène une vie confortable. Il est protégé par un couple de fermiers hongrois, les Stammer, qui découvrent sa véritable identité presque par hasard, suite à une opération vétérinaire trop habile pour un simple ouvrier agricole. Ils l’hébergeront pendant quatorze ans avant de rompre le pacte.
Vient ensuite une période plus misérable : neuf ans d’isolement dans une ferme, puis une retraite sordide dans une favela de São Paulo, où il vit pauvrement, épris de sa femme de ménage.
Le mythe Mengele, entre traque et fantasmes
Laurent Mauras a aussi évoqué le rôle ambigu du chasseur de nazis Simon Wiesenthal. Exceptionnel dans son travail, il était aussi un conteur habile. Il a volontairement alimenté des rumeurs pour faire peur à Mengele : le disant caché dans la jungle, baron de la drogue à Miami, voire converti au judaïsme… Autant de récits qui ont contribué à forger le mythe du « mal absolu ». Le plus ironique ? Wiesenthal ignorait où il se trouvait vraiment, mais Mengele ignorait que Wiesenthal l’ignorait.
Un homme médiocre, transformé par le système
L’historien a insisté sur un point crucial : Mengele n’était pas un monstre solitaire, mais un homme plutôt médiocre que le système nazi a perverti. Excellent étudiant, entré dans la SA puis la SS, il est envoyé à Auschwitz en 1943 par son directeur de thèse, qui lui présente le camp comme « le plus grand laboratoire du monde ». C’est là, à seulement 32 ans, que ses expériences sur les jumeaux le font basculer dans l’horreur.
Après-guerre, il rejoint comme beaucoup l’Amérique du Sud, où une colonie allemande bien établie lui offre un refuge. Il y tient un journal teinté de paranoïa et de délire, témoin de son lent déclin.
Une fin banale, une justice qui ne vint jamais
Mengele meurt en 1979 d’un AVC lors d’une baignade près de São Paulo. Son corps est exhumé six ans plus tard ; des analyses ADN confirmeront définitivement son identité en 1992. Son crâne repose aujourd’hui à l’Institut Médico-Légal de São Paulo. Une fin frustrante, souligne Laurent Mauras : une longue vie misérable, mais jamais jugée.
Rendez-vous en Février 2026
La Floureto prend sa pause hivernale. L’association a donné rendez-vous à ses adhérents et au public curieux en février 2026, promettant des sujets « un peu moins lourds« . La forte affluence de ce samedi montre, s’il le fallait, que l’appétit pour des rencontres culturelles exigeantes et accessibles est toujours bien présent.
